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Le Modèle 247 de Boeing fut un des premiers avions de transport à intégrer pleinement des avancées technologiques comme la construction tout métal (l’aluminium anodisé), une structure semi-monocoque, une aile cantilever et un train d'atterrissage rétractable. L’avion comportait bien d’autres innovations, telles que l’emploi de gouvernes compensées, un pilote automatique et un système de dégivrage par bottes gonflables sur les ailes et l'empennage.
Commandé "sur plans", le 247 effectue son premier vol le 8 Février 1933 et entrera en service plus tard la même année. Si on assiste à partir de cette époque à une évolution constante en ce qui concerne les capacités et le nombre de moteurs, il est remarquable de constater qu’aucun changement significatif sur la formule de base de cet avion n’apparaîtra par la suite, si ce n’est l’arrivée d’avions pressurisés, puisque les vols à haute altitude sont progressivement introduits au début des années 1940 grâce, notamment, au Boeing 307 Stratoliner.
Avec le modèle 247, Boeing éclipse tous les autres constructeurs de l’époque en incorporant une foule de caractéristiques aérodynamiques et techniques dans un avion de ligne. Cette petite révolution dans la conception des avions de transport commence d’ailleurs plus tôt, lorsque le Boeing Monomail ou le bombardier B-9 émergent déjà de par leurs qualités de vitesse et de sécurité combinées. Le Boeing 247 est plus rapide que les premiers avions de combat américains de l'époque, tels que le Boeing P-12, un biplan à cockpit ouvert. Les caractéristiques aérodynamiques permettent de plus une vitesse très raisonnable à l’atterrissage, de l’ordre de 100 km/h, ce qui permet de se passer de l’utilisation de volets, et les pilotes apprennent vite qu’à des vitesses aussi faibles que 10 miles par heure (16 km/h), le 247 peut très bien être taxié "queue haute", ce qui facilite grandement les manœuvres au sol.
En outre, le 247 est le premier avion de transport à pouvoir vraiment voler sur un seul moteur. Avec ses hélices à pas variable (équipement standard sur la série 247D), le 247 pouvait maintenir 3.500 mètres à la masse maximale de décollage. Ces caractéristiques fixeront la norme pour le Douglas DC-1 et les autres avions de ligne apparus juste avant la Seconde Guerre mondiale. Initialement prévu pour le transport de 14 passagers et propulsé par des moteurs en étoile Pratt & Whitney R-1690 Hornet, l'examen préliminaire du concept par les pilotes de United Air Lines donnera néanmoins lieu à l’adoption d’une configuration définitive plus modeste.
Une préoccupation des pilotes était qu’aucun aérodrome de l’époque n’était dans la capacité d’accueillir en toute sécurité des avions de plus de 8 tonnes. Paradoxalement, ils s’opposaient aussi à l'utilisation des moteurs Hornet, la plupart d’entre eux étant habitués aux Wasps moins puissants. Ingénieur en chef chez Pratt & Whitney, George Mead savait que cette vue était erronée et qu’elle semblerait tout à fait archaÏque dans quelques années. Le président de P & W, Frederick Rentschler, face à une décision difficile, fini quand même par acquiescer à la demande des pilotes. Cette décision n’allait pas manquer de créer un fossé entre Mead et Rentschler.Malgré ces désaccords amers sur la conception et les moteurs, le 247 restait une réussite remarquable et fit sensation lors de l'Exposition universelle de Chicago en 1933.
Contrairement à la disposition aérodynamique classique du pare-brise, celui des premiers 247 était incliné vers l’avant. C’était la solution apportée au problème de réflexion de la lumière provenant des instruments de bord pendant les vols de nuit, mais il s’avéra vite que le pare-brise ainsi disposé reflétait les lumières du sol à la place, en particulier lors de l'atterrissage, tout en augmentant également la trainée. A l'introduction du 247D, le pare-brise fut donc incliné vers l'arrière de manière conventionnelle, et le problème d’éblouissement résolu par l'installation d'une extension (le glarescreen) par-dessus le panneau des instruments.
Le train d'atterrissage principal ne se rétractant pas complètement, une partie des roues restait visible en-dessous des nacelles. Ceci est typique des dessins de l'époque, et supposé réduire les dommages structurels lors d’un atterrissage train rentré. La roulette de queue n'était pas rétractable. Tandis que les modèles 247 et 247A avaient des capots moteur en anneau et des hélices à pas fixe, le modèle 247D incorporait un capot NACA et des hélices à pas variable.
Boeing était déjà très concerné par l’aspect sécurité de ses machines, sans délaisser le confort dont profiteraient les passagers et l’équipage. La climatisation automatique et les efforts d’insonorisation en sont des exemples. L'équipage comprenait un pilote et co-pilote ainsi que d'une hôtesse de l'air dévouée aux besoins des passagers.
Alors que le 247 émergeait de sa phase de développement, la société allait tout de suite en tester les capacités en l’inscrivant sur une course aérienne de longue distance en 1934: la course MacRobertson, disputée entre l'Angleterre et l'Australie. Un 247D modifié fut inscrit, piloté par le Colonel Roscoe Turner et Clyde Pangborn. Le Boeing 247, numéro de course "57" était essentiellement un modèle de production, mais tout le mobilier propre aux avions de ligne avait été supprimé pour accueillir des réservoirs supplémentaires (huit au total). La course MacRobertson attirait toutes sortes d'avions venant de partout dans le monde y compris des prototypes ou des modèles de production établis, cette difficile épreuve étant considérée comme un excellent terrain d'essai ainsi que l'occasion d'attirer l'attention dans le monde entier. Turner et Pangborn se classèrent en deuxième position dans la section "transport" (et troisième au classement général), derrière leur rival direct, le nouveau Douglas DC-2.
Après avoir remporté en 1934 le trophée d'excellence US Collier dans le domaine de la conception aéronautique, les premières commandes furent affectées à la compagnie Boeing Air Transport de William Boeing.
Le 247 était capable de traverser les Etats-Unis d'est en ouest en huit heures de moins que tous ses prédécesseurs, comme le trimoteur Ford ou le Curtiss Condor. Entré en service le 22 mai 1933, un 247 de Boeing Air Transport allait établir un record de vitesse lors de son vol inaugural entre San Francisco et New York avec un temps de vol de 19 heures et demie. Pour la première fois des passagers pouvaient traverser le pays sans avoir à changer d'avion ou à s'arrêter pour la nuit.
En raison de la demande initiale de transporteurs aériens américains, Boeing allait vendre les 60 premiers 247 à sa compagnie affiliée, Boeing Air Transport (qui faisait partie de la United Aircraft et Transport Corporation, UATC), à un prix unitaire de 65.000$. TWA (Transcontinental & Western Air) commanda également le 247 mais UATC allait décliner l'offre, ce qui entraîna le président de TWA, Jack Frye, à financer la conception du prototype DC-1 de Douglas, qui, comme tout le monde sait, allait donner naissance au succès planétaire que fut le DC-3.
Bien que le concept de Boeing avait été le premier à connaître la production en série, le 247 allait vite souffrir de quelques défauts de conception assez rédhibitoires. La capacité limitée à 10 passagers était un inconvénient majeur pour les transporteurs aériens qui allaient naturellement se tourner vers le DC-2, puis le DC-3; des avions nettement plus rentables à ce niveau. Le Lockheed modèle 10 Electra, qui avait une configuration similaire, était d’un dessin plus compact, et cet avion pouvait transporter le même nombre de passagers à un coût bien moindre. Une autre caractéristique devant influencer le confort des passagers était que le longeron principal de l'aile du 247 traversait carrément la cabine, et des personnes se déplaçant au travers de celle-ci avaient à enjamber cet obstacle.
Soixante-cinq modèles 247 furent construits. Par contraste, Douglas recueilli 800 commandes civiles pour son DC-3 avant l'attaque de Pearl Harbor, et allait produire plus de 10.000 de ces machines, version militaire C-47 comprise, tandis que la "famille Electra" de Lockheed allait finalement atteindre plus de 3.000 ventes dans les différentes variantes civiles et militaires. Boeing Air Transport avait acheté 60 exemplaires et United Aircraft Corp 10. Quatre avions allèrent à la Deutsche Luft Hansa, et un dernier fut acheté par un privé en Chine. Alors que l'industrie se standardisait sur les concurrents de Boeing, de nombreux avions de United furent ensuite achetés par Western Air Express "à prix cassés".
Le 247 reste en service aérien jusqu'à la Seconde Guerre mondiale et plusieurs machines seront converties en C-73 de transport et d’entraînement. L’escadron 121 de la Royal Canadian Air Force (RCAF) exploite sept 247D pendant la première partie de la guerre. Certains 247 volaient encore dans les années 1960, convertis soit en transport de fret ou en avions d'affaires privés.
Un certain nombre de variantes spécialement modifiées inclurent un Boeing 247Y de United que l’Air Corps avait modifié avec deux mitrailleuses dans le nez. La même installation allait plus tard être adaptée à un 247Y détenu par le général Tchang KaÏ-chek, cet avion comportant également une mitrailleuse de calibre .50 Colt montée sur support flexible. Un 247D acheté par la Royal Air Force britannique fut transformé en plateforme d'essai pour de nouveaux équipements, avec un nez non standard, de nouvelles motorisations et un train fixe.
Le 247D de Turner et Pangborn existe toujours. Opéré à partir du 5 Septembre 1934, il fut loué par United Airlines pour la course MacRobertson de 1934 puis est retourné à United où il fut en service régulier jusqu'en 1937. Par la suite, ce 247D fut vendu à la "Union Electric Company" de Saint-Louis pour une utilisation comme un transport "executive". Le Bureau de la sécurité aérienne achète l'avion en 1939 où il restera en service pendant 14 ans avant d'être remis au National Air and Space Museum de Washington DC. Il y est visible aujourd'hui avec deux marques de série, le côté gauche étant marqué NR257Y, comme en 1934 lors de la course MacRobertson, tandis que le côté droit est peint aux couleurs de United Airlines.
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