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Anderlecht (Belgique) 21 avril 1895 - † Woluwé-St-Lambert (Belgique) 20 juin 1988
Né le 21 avril 1895 à Anderlecht (près de Bruxelles), Alfred Renard avait manifesté très tôt des talents d'habile "touche-à-tout" des techniques modernes de l'époque, installant dans sa jeunesse des matériels "d'avant garde" (électricité, téléphone) dans la ferme de l'un de ses oncles. Lorsque dans les années qui précédèrent la Première Guerre Mondiale, le constructeur Peugeot créa le "Prix du Décamètre" qui récompenserait le cycliste qui, à l'aide de sa seule force musculaire, parviendrait à faire décoller sa bicyclette et à lui faire effectuer un bon de dix mètres, Alfred Renard et son frère Georges s'attelèrent à la construction d'une machine de leur conception. Ils avaient modifié une bicyclette, lui adjoignant une hélice de leur fabrication (qui existe toujours) et une aile entoilée qui pouvait être braquée au moyen d'une manette, lorsque la vitesse suffisante était atteinte. La Grande Guerre survint avant qu'ils ne réussissent. (Le Prix Peugeot sera remporté en 1921 par Gabriel Poulain).
Ayant fait l'acquisition d'un tour à pédales, les deux jeunes frères confectionnèrent des pièces mécaniques pour un artisan bruxellois. Ils fabriquèrent également des moteurs qu'ils essayaient dans le grenier familial reconverti en atelier. C'est dans ce même atelier qu'ils entreprirent la confection d'un dirigeable de 5 mètres de long. L'enveloppe fut gonflée à l'air, mais devant l'opposition familiale, le remplissage au gaz n'eut pas eu lieu, en raison du danger que représentaient d'éventuelles fuites.
Après des études à l'Université Libre de Bruxelles, Alfred Renard suivit les cours de la Faculté des Sciences appliquées et obtint un diplôme d'ingénieur civil en 1920, et la licence d'aéronautique le 23 octobre de la même année.
Le professeur Allard, chef du STA (Service Technique de l'Aviation), qui venait de créer le Laboratoire Aérotechnique de Belgique, retrouva son ancien élève alors que ce dernier effectuait son service militaire dans les services cartographiques de l'Armée, dessinant des plans d'aérodromes. Ils étudièrent ensemble les plans du tunnel aérodynamique de Rhode St-Genèse et la construction du premier monoplan avion entièrement métallique, l'ACAZ T-2, qui n'eut guère de succès. Ils se rendirent à plusieurs reprises à Paris pour rencontrer Gustave Eiffel, ce qui permit ultérieurement à Alfred Renard de conter de façon humoristique son premier voyage en avion. (Emmitouflé dans un manteau en fourrure et un passe-montagne, il dut, pendant les trois heures et demie d'u trajet effectué en plein mois de décembre, tenir la poignée de la verrière dont le mécanisme était défaillant.)
Le laboratoire de Rhode S-Genèse devint une "véritable usine", sous la houlette du professeur Allard. C'est à cette époque, au début des années vingt, qu'Alfred Renard dessina pour la société ACAZ (parfois dénommée ZACCO), en collaboration avec l'ingénieur Allard, le premier monoplan entièrement métallique ACAZ T-2. L'appareil, à aile haute et à conduite intérieure, fut fabriqué par les Ateliers de Constructions Aéronautiques de Zeebrugge, mais n'eut guère de succès.
Stampe et Vertongen, qui avaient créé leur société, la SNC, avaient transformé des Fokker D.VII de récupération pour en faire des appareils biplaces destinés à leur école de pilotage. (Notons qu'à cette époque, les FAé confiaient l'écolage élémentaire à des entreprises civiles). Les deux associés en étaient arrivés à la conclusion qu'il était préférable de construire leur propre appareil, l'achat d'appareils neufs étant bien trop onéreux et la solution Fokker ne pouvant être que transitoire. Sur les conseils de leur camarade d'escadrille Maurice Boel, passé après la guerre au STA, Jean Stampe et Maurice Vertongen rencontrèrent Alfred Renard, au laboratoire de Rhode St-Genèse. Un accord fut conclu : Alfred Renard dessinerait donc les appareils d'écolage qui seraient construits par la SNC.
Il est à noter qu'Alfred Renard ne fut jamais cadre salarié ou actionnaire de la société Stampe & Vertongen : nommé ingénieur principal au STA, il ne désirait pas abandonner cette position. Il se contenta d'être donc consultant extérieur, ayant négocié des royalties sur les appareils de sa conception construits pas Stampe & Vertongen. Précisons qu'il n'y eut jamais de société RSV, ce sigle désignant simplement (avec les chiffres appropriés) les appareils conçus par Alfred Renard et construits par la société Stampe & Vertongen.
Créateur de la "Société anonyme des Avions et Moteurs Renard" (avril 1925) qui produisit entre autres des moteurs qui furent livrés aux USA et à la Pologne (sans compter ceux qui furent utilisés par l'hélicoptériste Florine), et rejoint en 1928 par son frère Georges pour la création de Renard Constructions Aéronautiques, Alfred Renard se désengagea progressivement de la RSV, sans toutefois couper les ponts de façon orageuse avec Stampe et Vertongen, ainsi qu'il le fut prétendu.
Il peut être intéressant de noter que Ivan R. Gates, citoyen américain, personnage contesté aux USA, pionnier de l'aviation pour certains, funambule pour d'autres, et promoteur du Flying Gates Circus, spectacle aérien époustouflant mais assez peu respectueux de la sécurité des pilotes (ni du public), voulut profiter du grand boom aéronautique qui sévissait aux États-Unis pour commercialiser un RSV "Convertible", à grand renfort de publicité tapageuse. Il s'agissait des RSV 18/100 et RSV 26/100, respectivement monoplan convertible en biplan et inversement. Rattrapé par la crise économique, Gates vit son affaire broyée par le crash financier de 1929 et se suicida.
Quantité d'appareils et de projets divers naquirent : citons pour mémoire le malheureux "Épervier", le R-17 conçu à l'origine pour livrer les raisins belges en Angleterre, le trimoteur R-30 destiné aux services postaux, transports de passagers et relevés topographiques au Congo, le (plus connu) R-31 adopté par l'Aviation Militaire Belge comme appareil d'observation, le trimoteur R-35 de haute altitude, le chasseur R.36 auquel le Ministère belge de la Défense préféra le Hawker Hurricane (pour des raisons encore floues et bien éloignées de toute considération technique) et le R.40 pressurisé à cabine largable conçu pour le compte du Ministère français de la Défense (ultime évolution du R.36), perdu dans la débâcle de 1940.
Lors de l'exode de 1940, le matériel fut détruit et les bâtiments occupés par les Allemands. Alfred Renard entra dans la clandestinité et fit partie des "Services de Renseignements et d'Actions" sous le nom de code "Elisabeth". Médaillé à la Libération, on le retrouva comme conseiller technique à la SNCB pour laquelle il étudia des automotrices en alliage léger. En 1947, il s'associa avec Jean Stampe et fut, jusqu'en 1970, administrateur-délégué de la Société Stampe & Renard. La société s'occupa de la fabrication des SV-4b, de l'entretien de divers appareils des FAé, du développement du SR-7, de la conception de prototypes d'hélices ainsi que de la fabrication de composants en fibres synthétiques pour les chasseurs Avro Canada CF-100 et Lockheed F-104. A noter également que dès sa création, la firme Stampe & Renard reprit le projet R-45 (SR-45) cargo. Une solution originale que cet appareil bipoutre : la cabine était amovible et on aurait pu, au gré des besoins, l'échanger contre une autre, de formes et de dimensions plus adaptées. La cabine était en fait l'équivalent d'un container non-travaillant fixé par cinq points sur la partie centrale de l'aile. La SABENA lui préféra le DC-4.
Alfred Renard, ingénieur aux talents multiples, l'un des rares à avoir monté des moteurs de sa fabrication sur des appareils qu'il concevait, fut victime le 10 juin 1988 d'un accident de la circulation et décéda dix jours plus tard, à 93 ans. Grande figure de le technique et de l'aéronautique belge, concepteur et constructeur d'un quantité non négligeable de moteurs, d'appareils et de prototypes, il est resté jusqu'à son dernier souffle d'une activité qui émerveillait tous ceux qui l'ont côtoyé.
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